Aujourd’hui, je souhaite partager une histoire personnelle qui a profondément influencé mes valeurs professionnelles et surtout personnelles.
Ce n’est pas un article sur le fitness, la nutrition ou le bien-être, mais un hommage à une femme extraordinaire sans qui je ne serais rien aujourd’hui : ma mémé. Cette femme âgée m’a recueilli lorsque j’avais 3 mois, en l’année 1964. Elle avait 72 ans et se prénommait Victoria.
D’autres enfants vivaient déjà dans sa maison d’accueil, notamment des membres de ma propre famille : oncles, tantes, puis plus tard mes cousins et surtout ma cousine, ou plutôt ma petite sœur, avec laquelle j’ai partagé tant de souvenirs. Je fus par la suite le dernier enfant à rester près d’elle, jusqu’à son décès en 1989.
Nous vivions dans une petite maison en location dans des conditions de confort minimalistes : pas d’eau chaude ni de salle de bain, les toilettes étaient un trou au fond du jardin et pour le chauffage, un poêle à fioul et une cuisinière à bois et charbon sur laquelle nous faisions chauffer l’eau pour nous laver. J’ai vécu plus de 20 ans dans cette maison et malgré son manque de confort, très relatif quand on n’a connu que ça, j’en garde des souvenirs impérissables car mon imagination fertile, grâce à la lecture, me permettait de m’évader en m’inventant un terrain de jeu sans limite.
Mémé n’avait que peu fréquenté l’école, car aînée de plusieurs frères et sœurs, elle eut la lourde tâche de s’en occuper pendant toute sa jeunesse. Elle ne savait ni lire ni écrire, mais assez curieusement, son émission préférée, que nous regardions chaque soir, était « Des chiffres et des lettres ». Les années ont passé, mais je ne comprends toujours pas pourquoi.
Cette femme a eu une vie où se sont succédé plusieurs drames. Née en 1892, mariée et devenue mère très jeune, elle a vécu les deux guerres avec toutes les horreurs qui les accompagnent. Tout d’abord son mari, parti à la guerre de 14-18, survivant mais revenu avec des traumatismes que je n’ose imaginer. Puis celle de 39-45 avec ses trois fils partis au front, dont l’un réussira à s’évader d’un camp en Allemagne avant d’être tué dans la même maison où j’ai grandi, victime d’un bombardement des forces alliées américaines suite à une erreur sur le village à bombarder.
Ses deux autres fils se sont fâchés car l’un d’eux avait eu la mauvaise idée de séduire la femme de l’autre lorsqu’il était au front. Ils ne se sont plus reparlés pendant près de 40 ans. Son mari, qui était menuisier, est décédé avant mon arrivée, à la fin des années 50. Elle tenta ensuite de survivre avec la maigre retraite de son défunt mari. Pour arrondir les fins de mois, elle gardait des enfants venus de tous horizons et de toutes nationalités. Elle effectuait également des ménages tout en s’occupant du parc dans la propriété d’une doctoresse.
Malgré tous ces drames vécus, je n’ai jamais entendu mémé se plaindre, une force de caractère et un optimisme inébranlable dont je m’inspire au quotidien.
Lorsqu’elle a arrêté cette activité usante, elle avait plus de 80 ans. Grâce à elle, je n’ai manqué de rien. Oh, rien de superflu, mais j’ai eu mon propre vélo et même une mobylette, chèrement payée à la sueur de son front. Boursier pendant toute ma jeunesse, je savais qu’il ne me serait pas possible de me lancer dans des études secondaires, bien trop chères pour nos maigres revenus. J’ai donc commencé à travailler à 18 ans et je ne m’en suis pas trop mal sorti puisque maintenant, en dehors de mes activités de fitness, j’occupe un poste en expertise informatique dans un grand groupe bancaire.
Lorsque mémé a eu 95 ans, le nouveau propriétaire de notre maison a eu l’idée de génie de nous demander de partir car il souhaitait réhabiliter la maison pour en faire des studios locatifs. Comme je travaillais, j’ai pu prendre, dans le même village, un appartement en rez-de-chaussée et mémé a enfin découvert le confort avec l’eau chaude, le chauffage au sol, une salle de bain et des toilettes ! Mais ce fut un véritable déchirement pour nous, surtout pour mémé, obligée de quitter ses souvenirs pour se retrouver dans un lieu sans âme.
Pourquoi je vous raconte ce pan de ma vie aujourd’hui ? Car son sourire et ses yeux rieurs me manquent, pour lui rendre hommage et également pour les valeurs de combativité, de générosité et de motivation sans faille que mémé m’a inculquées. Celles que j’applique chaque jour dans mon quotidien. Vitalité Sénior, c’est grâce à elle et c’est également pour elle. Si mes quelques articles peuvent aider ne serait-ce qu’une personne, alors c’est gagné. Oui, il y a des liens affiliés sur mon site, qui me permettent de le faire vivre, payer l’hébergement et les différents frais, mais j’ai bien un objectif que j’espère pouvoir réaliser : racheter la maison de mon enfance, la maison de mémé.
Comme le disait Périclès : « Si on veut obtenir quelque chose que l’on n’a jamais eu, il faut tenter quelque chose que l’on n’a jamais fait. »
Prenez soin de vous et de vos aïeux.